II.1 : Le Déterminisme
Passons à présent à la seconde partie qui affirme qu’à l’inverse des créateurs qui prétendent que le hasard est présent dans n’importe quelle création, certains nient la place du hasard.
Commençons tout d’abord par une citation de Heinz Pagels:
«Il semble bien qu'il existe deux types d'hommes: en poussant les choses à l'extrême, il y a ceux qui pensent que tout événement survenant dans le monde a une cause et une finalité, et ceux qui croient que Dieu joue aux dés et que les événements sont tous parfaitement aléatoires.»
Heinz Pagels, physicien
Il existe donc deux types de pensées vis-à-vis du hasard. L’un, croit que tout est dû au hasard et l’autre, pense que chaque acte possède un but, où les personnes ont du mal à accepter le côté aléatoire, elles refusent le désordre et l’absence de raisons pouvant expliquer la situation.
Tout d’abord, le mot «création» lui-même serait une opposition au hasard, à partir du moment on l’on crée, en particulier avec des outils qui transforment la matière, le hasard n’a pas sa place car l’idée de la création a été méticuleusement façonnée dans l’esprit avant d’être mis en route, elle est programmée.
Par exemple, dès l’Antiquité, nous avons, notamment en Grèce Antique, des hommes qui croient aux dieux mythologiques et à une force spirituelle qui leur est supérieure. En cas de famine à cause de mauvaises récoltes, en cas d’épidémies, ils affirmaient que c’étaient les dieux qui les châtiaient pour avoir commis un acte odieux. Par conséquent, pour se faire pardonner et pour éviter le retour des malheurs, ils faisaient des sacrifices. A l’inverse, en cas de bonnes récoltes ou d’évènements heureux, ils louaient les dieux avec des offrandes.
Principaux dieux mythologiques grecs
Processus de sacrifice d'un agneau.
Peinture sur bois, Corinthie, vers 540-530 av. J.-C., Musée national archéologique d'Athènes.
Ces superstitions ont souvent conduit à l’apparition de mythes, comme celles de Perséphone se faisant enlever par Hadès, et entraînant la tristesse de sa mère Déméter, qui décide alors de ne plus permettre aux hommes de cultiver leurs terres et d’avoir des récoltes. Par ailleurs, pendant l’Antiquité, les Hommes allaient souvent voir des oracles pour lire leurs destins entièrement tracé par les dieux, avec par ailleurs l’Oracle d’Apollon à Deplhes, la Pythie.
L'enlèvement de Perséphone par Rembrandt
Ruines du temple de Delphes
La Phytie sur un vase grec, version humoristique
Ces pensées religieuses, qui étaient non seulement présentes pendant l’Antiquité en Grèce, mais également à Rome, ou en Egypte, étaient toujours présentes pendant le Moyen-Age en France notamment, avec l’Eglise qui cherchait à fidéliser les habitants avec ces superstitions, mais aussi en premier lieu pour tenter d’expliquer le désordre des choses. Selon le philosophe Leibniz, Dieu aurait créé un monde tellement parfait que l’Homme n’aurait pas à intervenir, qui est une forme de déterminisme antérieur à celui que l’on connaît.
Leibniz
Cependant, avec le début des Grandes Découvertes et les avancées scientifiques de Newton, Copernic et Galilée, les personnes ont peu à peu perdu foi en l’Eglise et ont commencé à s’intéresser aux faits scientifiques.
Ainsi, selon Laplace, un mathématicien qui a développé les probabilités et les statistiques, cherche à trouver une part de liberté dans le déterminisme de Leibniz.
Laplace
Il affirme ainsi que les évènements ne sont en aucun cas dû au pur hasard, mais qu’il y a toujours dans les évènements une cause logique et naturelle provoquée par un effet de son état antérieur.
La foi déterministe était donc de rechercher toutes les lois universelles qui provoquaient des phénomènes et de développer la science pour les trouver. (La pomme qui tombe sur la tête de Newton, par exemple, n’est pas due au hasard, mais à celle ci, mûre, attirée par la gravité vers le sol.)
Avant Laplace, nous trouvons aussi Holbach, qui affirme d’une manière un peu plus brute que tout dans ce monde provient à partir d’une cause qui est nécessaire, entraîne des évènements d’autant plus nécessaires : il insiste sur une nécessité universelle physique et morale, que tout est là car cela a une utilité et est causé par quelque chose. Il affirme qu’une nécessité agit sur les mouvements, et donc que tout repose sur une fatalité prédéterminée. Par conséquent, selon lui, l’Homme n’a absolument aucun pouvoir sur ses actes. (Il s'inspire des idées des philosophes Spinoza et Hobbes.)
Le baron d'Holbach
Au XIXe siècle, Sigmund Freud, psychanalyste, affirme également que le hasard est exclu de la psychanalyse, car celle-ci repose sur un déterminisme inconscient de la vie psychique.
Cette théorie est donc contre celle du naturalisme, avec comme père Zola, où on cherche une excuse à l’homme. (Le naturalisme s’oppose par ailleurs à l’existentialisme : «nous sommes libres d’être ce que nous voulons et de nos choix», ce qu’explique Sartre dans L’existentialisme est un humanisme.)
Les naturalistes expliquent que la nature d’un homme est excusée due à sa naissance ou son environnement, ainsi cela recourait la recherche par rapport à l’ADN. Selon la structure des allèles, la nature de cette personne serait différente, c’est dans ses gènes.
Or l’existentialiste explique que si l’homme est ainsi, c’est qu’il a choisi de l’être. Il refuse catégoriquement l’excuse d’une nature dans l’organisme de l’homme. Cela pourrait excuser les meurtriers qui peuvent dire qu’ils possèdent un allèle plus long ou plus court et de ce fait, c’est dans leur nature s’ils sont des meurtriers.
Les déterministes définissent les hommes par leur choix et non pas par leur «nature» où tout est expliqué par le hasard et où ils ne peuvent trouver de réponse explicite face aux explications des naturalistes. Ces choix s’appliquent à la vie des hommes, et sont ces «causes antérieures» énoncées ci-dessus, qui impose les évènements postérieurs.